Pour appuyer une jurisprudence ou plus simplement valider le caractère islamique de toute conduite, les musulmans ont pris pour habitude depuis le Moyen Âge de se reporter à la sunna du Prophète Muḥammad. La sunna renvoie aujourd'hui à la tradition islamique, c'est-à-dire au hadith, des recueils de textes établis à partir du IXe siècle dans lesquels les faits et gestes du Prophète sont recensés, et auxquels les savants musulmans ont rattaché des chaînes de transmetteurs censées en garantir l'authenticité. Pourtant, il fut un temps où la sunna était indépendante du hadith, et sous prétexte d'en assurer l'authenticité, ces mêmes savants ont procédé à un travail de tri, d'ajouts et d'oublis volontaires de nombreuses paroles prophétiques pour prendre position dans des querelles juridiques ou théologiques. Dès lors, comment retrouver les premières traces de cette sunna "effacée" lors de ce processus de traditionnalisation et d'intégration au hadith ? La mise au point d'une méthode permettant de retrouver les traces perdues de cette sunna doit par la même occasion nous permettre de poser les jalons d'une nouvelle histoire des premières générations de musulmans en Arabie, en Syrie, en Irak et en Égypte.
